À Charlotte

J’suis maladroite quand j’aime J’protège, j’contrôle J’dis les choses qui faut pas dire Pis j’dis pas c’que j’voudrais dire J’fige Parce que c’est mieux rien dire que s’tromper Pis de laisser une faille à jamais gravée Dans l’âme de quelqu’un qu’on aime

J’suis maladroite quand j’t’aime toi Toi pis ton arrogance de petite fille qui gosse Pis tes danses en bobettes dans l’salon Toi qui me dis que des fois j’suis un peu bête Pis que toi aussi T’es un peu bête “Un peu”

Tes rires me manquent Quand j’suis toute seule dans mon appart trop cher de Montréal À cette station de métro-là Que j’crisserais en feu mais que j’aime un peu trop en même temps

Des fois j’m’enfuis dans le champ à côté de la maison grise Celle où t’es née Celle où j’ai aimé pour la première fois Celle où j’ai saigné pour la première fois Celle avec les murs encore frappé de mon corps qui jouit, de mon corps qui tremble Et qui tremble À toutes les heures de la nuit Des attaques et contre attaques à 2 vagues, 3 vagues, 4 vagues Couchée sur la céramique blanche en hexagone La céramique froide Du plancher de la salle de bain où ma soeur chante dans la douche Où j’dessinais notre coeur dans la buée sur la vitre Couchée sur la céramique blanche en hexagone À toutes les heures de la nuit Pis j’contre-attaque 5 seconde inspire J’garde 5 secondes expire J’contre-attaque Encerclée, cernée Dans les murs encore frappés de mon corps qui jouit, de mon corps qui tremble Qui pleure Qui hurle

Parce que si tu trouves pas une solution, j’t’amène à l’hôpital Si tu trouves pas une solution, y’aura plus de théâtre Si tu trouves pas une solution, y’aura plus personne Dans les champs radioactifs en circonférence autour de ta bombe Citalopram 25 mg, drop Citalopram 50 mg, incoming Lamotrigine 50 mg, take cover Quétiapine 25 mg, target hit

Des fois dans mes rêves j’m’enfuis dans le champ à côté de la maison grise Celle que j’suis plus capable de r’garder Pis j’cueille des brins d’herbe, des fleurs, des brindilles J’m’amuse à les tresser ensemble En repensant aux bruits des épées en bois qui se cognent Pis j’me demande comment on est devenus c’qu’on est devenus Comment les épées en bois sont devenues des vraies attaques et contre attaques À 2 vagues, 3 vagues, 4 vagues

Des fois j’quitte le champ à côté de la maison grise Celle où mes cris résonnent encore Pis j’cherche ton p’tit corps Tes yeux grands comme deux soleils Ton p’tit corps sur le trampoline Pour te prendre un peu dans mes bras Juste un peu Pendant qu’tu m’dis que j’sers trop fort

J’cherche ton p’tit corps Pour me rappeler pourquoi j’suis restée Ici Pis j’dépose ma couronne de fleurs vraiment laide sur ta tête Pis j’prie au dieu en lequel je crois pas vraiment Que tu te rappelleras de rien des deux dernière années Des grandes personnes sans visage De tes p’tits amis qui ont peur de mourir Des endroits où tu peux pas aller Des grandes personnes fâchées aux visages bleus pis aux yeux sombres Des mains à l’odeur de gel antiseptique Des guerres en silence Des regards de méfiance

J'prie au dieu en lequel j’ crois pas vraiment J'espère, j’prie, j’supplie Que tu m’en veux pas trop d’être partie Que t'auras pas peur comme moi Que les dommages sont pas irréparables Pis que tu vas t'aimer juste assez Pour aimer les autres comme il le faut

J’suis restée Ici Parce que j'vais trouver une autre maison Blanche Et bleue Et que j’serai debout Sur le plancher de céramique noir en carré À toutes les heures de la nuit Dans des murs qui n’attendent que de voir mon corps jouir, mon corps rire Chanter Danser À inspirer 5 secondes Garder À expirer 5 secondes Et laisser-aller

La maison blanche et bleue Où j’vais aimer encore La maison blanche et bleue Où ma soeur chante dans la douche Où j’dessine mon coeur À moi Dans la buée sur la vitre La maison blanche et bleue Où j’sers encore ton corps Juste un peu plus grand Dans mes bras

La maison blanche et bleue Où il y a encore du théâtre Et où les gens Les gens que j’ai choisis Qui m’ont choisie Restent dans les champs radioactifs autour de ma bombe Pour tresser des couronnes de fleurs vraiment laides À mettre sur la tête de celles et ceux Qui réapprennent tranquillement à aimer.


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